Création d’une filière de valorisation du pin maritime en Cévennes

Face à une sous valorisation du pin maritime implanté en Cévennes à partir du 19^ème siècle et à l’absence d’une filière réellement structurée, le syndicat mixte du Pays Cévennes a commandé une étude expérimentale visant la création d’une nouvelle filière d’extraction de la résine par gemmage. Ce projet, qui s’inscrit dans la charte forestière du Pays Cévennes, est le fruit d’une véritable dynamique collective rassemblant plus d’une trentaine d’acteurs tous amoureux des Cévennes et souhaitant œuvrer pour un territoire vivant : propriétaires forestiers, gestionnaires forestiers (Syndicats, associations, coopératives), entrepreneurs de la filière, chercheurs, porteurs et animateurs de la charte forestière.

Le soutien à la création et au développement des filières locales, fait partie de la stratégie du GAL Cévennes avec le souhait que le développement économique s’appuie sur les ressources locales tout en les préservant. Ce projet a été sélectionné par le comité de programmation du GAL Cévennes en lien avec la fiche action N°2 “Maintien et diversification des activités agricoles et forestières”.

A cheval sur le Gard, la Lozère et le sud Ardèche, les Cévennes sont caractérisées par une couverture à plus de 60% du territoire par la forêt, dont une grande partie est peuplée de pins maritimes (plus de 36 000 ha). Ce pin s’est répandu sans réelle gestion forestière. Actuellement transformé en bois-énergie et pâte à papier, ou en palette de bois, il est sous valorisé et de nombreuses parcelles sont difficiles d’accès. Par ailleurs, sont utilisés en France et localement, comme à la station thermale des Fumades, des produits issus de la résine de pins, telle que l’huile essentielle de térébenthine et la colophane, qui sont actuellement produites à l’étranger (Espagne, Portugal, Chine, Brésil, Indonésie) pour des usages industriels, pharmaceutiques ou cosmétiques. Face à cette opportunité de créer une filière locale d’extraction et de transformation de la résine de pin, nommée la gemme, une étude technique et économique a été lancée avec pour objectifs de :

• Évaluer les surfaces disponibles pour la récolte de résine
• Évaluer les quantités pouvant être extraites sur le territoire
• Évaluer les coûts de récolte et de distillation
• Comparer économiquement différentes techniques de distillation
• Cibler les acteurs potentiels (récoltants / transformateurs / utilisateurs) pour faire vivre la filière
• Fournir un modèle économique viable

Cette étude réalisée par le bureau d’étude Ceribois et d’un montant de 29 760 € a été financée par l’État via sa politique d’aménagement, de développement et de protection du Massif central à hauteur de 10 000 € et par l’Europe via le programme LEADER 2014-2022 du GAL Cévennes à hauteur de 13 800 €, soit une prise en charge totale de 80%.

Le gemmage étant une activité déjà présente sur le massif des Landes,  une coopération entre les territoires des Landes et des Cévennes s’est donc faite pour mener la partie terrain de l’étude. Une campagne de récolte a été organisée sur deux sites d’une commune gardoise, Le Chambon, en 2022, petite commune qui connait depuis de nombreuses années une forte implication de ses habitants. Les journées de récolte ont permis de former de futurs récoltants, grâce au savoir-faire de l’entreprise landaise Biogemme. Celle-ci a mis au point une technique de gemmage respectueuse de l’environnement.

La résine récoltée a été analysée par un laboratoire de recherche de l’INRAE et de l’Université de Montpellier. Le bureau d’étude a réalisé une cartographie des zones pouvant être exploitées (en fonction du relief, du diamètre des arbres, de l’accès), estimer les volumes de production, identifier les meilleures techniques de distillation (qualité du produit fini, niveau d’équipement), cibler et analyser une partie des secteurs de marchés les coûts d’exploitation, la marge brute. L’opportunité économique de cette filière a été validée et les futurs acteurs clefs identifiés.

Au-delà de l’apport d’un nouveau savoir-faire et d’une nouvelle activité économique sur le territoire, ce projet a amené plusieurs innovations techniques :

• Le travail de transmission de savoir-faire de l’entreprise landaise aux acteurs cévenols permet un approfondissement de la technique de récolte,
• Le bureau d’étude a créé un tableur d’estimation des coûts de production et de distillation de la gemme modulables selon différents paramètres, ce qui est inédit en France. Il n’existe pas d’outil comparable autour de la résine actuellement.